LE RETOUR DE PERSEPHONE

20 Mars 2025 - Equinoxe de Printemps

Comme chaque année, au moment de l’équinoxe de Printemps, on raconte que la Déesse Perséphone remonte du Royaume souterrain pour retourner à la surface du monde, où elle restera les 8 prochains mois, garantissant à celui-ci le retour de la vie jusqu’à l’hiver suivant.

Le retour du soleil après une éclipse.

La nature sortant de son hivernation.

La lumière au bout du tunnel.

L’enfant traversant le canal sombre de l’utérus vers un nouveau monde.

Un nouvel être qui sort de sa chrysalide.

Revenir des profondeurs à la surface.

The Return of Persephone- Kinuko Craft

Perséphone, Reine des royaumes souterrain, déesse vivant entre les mondes, qui mieux que toi pour m’aider à traverser ce passage?

Je ressens les contractions, je sais que le moment approche. Le doute, la peur, l’appréhension.

Comment revient-on du royaume souterrain ? Comment revenir à la lumière du jour, à la vie, tel le printemps?

Perséphone s’étire doucement et baille. “Observe” me souffle-t-elle.


Le conseil de l’arbre

A la sortie de l’hiver, les arbres doivent faire remonter la sève de leurs racines jusqu’aux branches pour donner l’énergie nécessaire à de nouvelles feuilles de pousser. Si l’on veut bourgeonner, il est nécessaire d’avoir bien nourri et ancrer ses racines au préalable, dans un sol fertile pour nous.

Le conseil du papillon

La plupart des gens pensent certainement que pour devenir un papillon, la chenille a simplement besoin de construire son cocon, se mettre dedans et attendre. (Ou pire, la plupart des gens ne se posent pas la question !) Un peu comme mettre un plat dans le four et « dring! » au bout d’un certain temps c’est prêt! Ça y est le papillon sort et s’envole. La réalité: à l’intérieur du cocon les chenilles se décomposent et recomposent, traversent tout un tas de processus chimiques et biologiques, qui, si on le prend en plein milieu, ressemble à pas grand chose d’autre qu’une chose gluante et pas très ragoutante. Non seulement il serait évidemment destructeur d’ouvrir le cocon pendant ce processus délicat. Mais même à la toute fin de la transformation, quand la chenille n’est plus et qu’apparaît le nouvel être, papillon, il serait désastreux d’ouvrir le cocon pour le faire sortir, car alors jamais il ne pourrait voler! Et sa longue transformation en être ailé serait vaine. En effet, c’est la montée d’adrénaline servant à réaliser sa percée hors de sa chrysalide qui fait monter le sang dans ses ailes pour qu’elles puissent s’épanouir…

Il est sage de respecter son rythme de transformation et faire confiance à la vie qui nous anime plutôt que de forcer les choses “pour aller plus vite.”

Le conseil du bébé humain

Comme le papillon, nous aussi humains, sommes passés par un long processus de transformation, de création de notre être au sein de la matrice de notre mère. Cette première vie de neuf mois en tant que foetus, l’accouchement en représente la fin. “quand nous disons qu’un enfant naît en réalité il meurt au monde des foetus”(Patrice Van Eersel). Ce passage de l’obscurité à la lumière, de l’eau à l’air, de l’intérieur à l’extérieur, cette première arrivée dans un nouveau monde est très inconfortable! Il y a tout à réapprendre: une nouvelle façon de respirer, de se nourrir, de se faire comprendre, de trouver la connexion émotionnelle avec l’autre…

Le bébé humain n’a pas d’autre choix que de faire preuve de patience et de lâcher-prise, afin de se laisser le temps de s’acclimater à cette arrivée dans le monde. Son meilleur outil pour cela est la curiosité de la découverte, s’accompagnant d’un sentiment d’émerveillement.

Ainsi, la nature semble détenir les secrets du cycle perpétuel de transformation vie-mort-vie, de passage de l’obscurité à la lumière, d’un monde à un autre, d’un temps à un autre, dans lequel rien n’est perdu, tout ce qui meurt nourrissant une vie nouvelle.

LE RETOUR AU MONDE

Il y a quelque chose d’héroique dans le fait de s’arracher à son monde natal pour aller se rencontrer dans son essence la plus profonde, et rencontrer la vie dans son véritable potentiel. C’est presque indécent de faire ce choix au yeux de certains dans notre société humaine. Cela m’a demandé d’aller puiser en moi une force et des ressources très très profondes pour réussir à passer ce cap. Même si dans un sens je n’avais pas vraiment le choix, puisque c’était une question de survie, cela ne rendait pas la tâche plus aisée pour autant. Je pensais que cela serait l’étape la plus dure. Mais revenir semble demander des ressources tout aussi puissantes que de partir

Joseph Campbell, le grand professeur en mythologie qui a élaboré la théorie du monomythe détaillée dans son livre “The Hero of a Thousand Faces” -utilisé par Tolkien comme base structurant ses oeuvres- parle de l’importance et de la difficulté de l’étape du retour du Héro :

« Une fois la quête héroïque accomplie(...) l'aventurier doit encore revenir avec son trophée de transmutation de vie. Le tour complet, norme du monomythe, exige que le héros entreprenne maintenant l'œuvre de rapporter les runes de sagesse au royaume de l'humanité, où le bienfait pourra contribuer au renouveau de la communauté, de la nation, de la planète.”

« Le héros qui revient, pour mener à bien son aventure, doit survivre à l'impact du monde. De nombreux échecs témoignent des difficultés de ce seuil d'affirmation de la vie. "

Difficile d’autant plus qu’il n’y a pas de retour à “la vie d’avant” la quête -l’exil, le retour à soi, le chemin initiaque- possible. Les mots de Frodon à la fin du Seigneur des Anneaux trouvent écho en moi :

“ Comment reprendre le cours de son ancienne vie ?

Comment continuer lorsque dans son coeur on commence à comprendre que l’on ne peut plus retourner en arrière ?

Il y a des choses que le temps ne peut cicatriser, des blessures si profondes qu’elles se sont emparées de vous. “

Impossible de reprendre le cours de mon ancienne vie. Même si je le voulais, je ne le pourrai: la personne que j’étais avant n’est plus. Ces 9 années de voyage intérieur profond, au sein de ma chrysalide, m’ont transformé de manière irrémédiable. L’être-chenille n’est plus, ma psyché a mue jusque dans ses racines les plus profondes, jusqu’à faire naître de nouvelles parts de moi, comme une expansion de mon être, laissant émerger des ailes qui jusqu’à alors gisait à l’état de simple potentialité.

“Pour être pleinement vivant, il faut être mort au passé.”

- Deepak Chopra ‘La voie du Magicien’

Revenir dans le monde après l’avoir quitté pour revenir à soi, c’est comme naître à ce monde une seconde fois. La différence avec notre première naissance c’est qu’il ne s’agit pas de faire naître un nouveau corps physique, mais de naître en conscience. Chose que nous n’avons pas pu faire dans la première.

“Il nous faut naître deux fois pour vivre un peu, ne serait-ce qu’un peu. Il nous faut naître par la chair et ensuite par l’âme. Les deux naissances sont comme un arrachement. La première jette le corps dans le monde, la deuxième balance l’âme jusqu’au ciel.” - Christian Bobin, “La plus que vive “

J’irai plus loin en disant que, pour l’être humain qui a traversé ce chemin, il vit trois naissances: la première où il naît au monde, la deuxième où il naît à lui-même (le retour à soi), et la troisième où il naît à nouveau au monde. Le monde lui est néanmoins témoin seulement de deux de ces naissances, la première et la troisième.

LE LIVRE DE LA SORTIE À LA LUMIÈRE DU JOUR

Pour les anciennes traditions et grandes civilisations telles que l’Egypte, la Grèce, l’Inde, la renaissance semble être une science et un art dont ils avaient non seulement grande conscience, mais qu’ils cultivaient soigneusement à travers des pratiques et enseignements spécifiques consignés dans des manuscrits anciens: Les plus connus, le Bardo Thodol ou livre des morts tibétains, le livre “Pour sortir au Jour” des anciens égyptiens. Certes ces enseignements mystiques visaient à préparer l’âme au passage entre ce monde et l’autre monde, concernent un processus de transmutation de la conscience dans le contexte de la migration de l’âme du monde des vivants à l’autre monde et vice versa. Mais j’y trouve matière à m’inspirer pour effectuer ce retour au monde, cette renaissance en conscience.

“Selon l’enseignement tibétain, les différentes étapes ou phases vécues dans le Bardo, ne sont pas autre chose que les états de conscience qui se succèdent naturellement dans notre vie terrestre lorsqu’on suit une voie initiatique ou spirituelle.”

LE BARDO-THODOL DE LA RENAISSANCE

p. 83 extraits du livre ‘Le Bardo-Thodol’ de Robert Jacques-Thibaud

CHOISIR SON LIEU DE RENAISSANCE ET SON HEURE

Le Bardo Thodol invite à “choisir la matrice qui sera la plus adaptée à sa renaissance”

CHOISIR SON NOM

“L’énergie du nom était aussi très connue des Egyptiens qui pensaient que donner un nom donnait la vie '(animait) et donnait aussi la forme, car la forme et la vie étaient pour eux inséparables.” “nombreux étaient les religieux qui choisissaient un nom particulier reflétant la nature de leur engagement spirituel et le but qu’ils s’assignaient.”

CHOISIR LES CONDITIONS DE SA RENAISSANCE

“Par sa voix, le Thodol recommande à l’esprit du défunt, que son mauvais karma a aveuglé jusque là, de ne pas choisir n’importe quelle porte afin de ne pas endurer par la suite, de terribles souffrances.

The Rainbow Body

“Les pratiquants du Dzogchen manifesteraient le « corps d'arc-en-ciel » quand leurs divers éléments se résorbent dans l'essence lumineuse qui les a créés et que le corps physique se fond en lumière (ou pure énergie lumineuse) avant de disparaître complètement aux yeux des vivants. Ce processus est censé générer une lumière vive et des arc-en-ciel d'où son nom. Il s'agirait d'une transmutation durant laquelle le corps physique deviendrait de plus en plus subtil.”

source: wikipédia


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